Les élections européennes 2024. En route pour la constituante ?

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Beitragsfoto: Europäisches Parlament in Straßburg © Erich Westendarp auf Pixabay

Je vais tenter ce soir de vous apporter quelques éléments de réflexions en vue des élections européennes de 2024, qui devraient déboucher sur la mise en place d’une Assemblée constituante de plus en plus indispensable au progrès de la partie européenne de l’humanité. Il est patent que les dirigeants de nos États font fausse route, depuis aujourd’hui 73 ans, car la fédération européenne annoncée le 9 mai 1950 par Robert Schuman n’existe toujours pas.

En ce 9 mai, ce matin, au rond-point Schuman, nous avons célébré toutes les choses positives que l’Union européenne a réalisées, dont le marché et la monnaie uniques, l’ouverture des frontières, les échanges Erasmus, mais cela ne doit pas occulter l’insignifiance et l’impotence de l’UE sur la scène internationale. Elle n’a pas su réduire les tensions, ni entre la Russie et la Géorgie, la Moldavie ou l’Ukraine, ni entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, ni entre Israël et la Palestine, ni entre l’Algérie et le Maroc, ni en Libye, en Syrie, dans la Corne de l’Afrique, au Sahel, au Sénégal, en Centre-Afrique, au Congo ex-belge, ni entre le Venezuela et la Colombie, ni entre la Chine et plusieurs de ses voisins, par exemple.

M. Macron en est conscient. En vue du Conseil européen des 23 et 24 juin 2022, il avait proposé d’établir une Communauté politique européenne, pour réunir rapidement, ce que l’UE, constate-t-il à juste titre, ne peut faire, les États européens qui partagent nos valeurs démocratiques et qui veulent contribuer à la sécurité, la stabilité et la prospérité de notre continent. Le 6 octobre dernier, 44 chefs d’État et de gouvernements se sont réunis à Prague pour fonder cette Communauté politique européenne, sans autre résultat concret qu’une photo-souvenir d’une rencontre extrêmement coûteuse et nocive pour l’environnement, compte tenu de la masse de gaz à effet de serre émise pour le transport des participants.

Depuis le 24 février 2022, la guerre que la Russie fait à l’Ukraine a enfin fait prendre conscience à l’opinion publique européenne de l’extrême faiblesse de nos armées, y compris en France et au Royaume-Uni. Nous avons compris que nos chefs d’État et de gouvernements sont aussi peu capables de faire face aux menaces actuelles que ceux des années 1910, 1930 et 1990 l’ont été à l’époque des guerres balkaniques et mondiales, de la guerre d’Espagne ou du déchirement de l’ex-Yougoslavie. Les institutions européennes sont de plus en plus décrédibilisées, par de mesquines questions de préséance entre autorités ou par des soupçons de corruption, ou par leur inaptitude à la gestion des crises.

Celles-ci furent nombreuses en un quart de siècle : financière en 2008, monétaire en 2010, migratoire en 2015, sanitaire en 2020 et 2021, géopolitique en 2022 avec l’intensification de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Il ressort de nos échecs que nos politiques économique, fiscale, de l’emploi, de l’environnement, de la migration, de la santé, que notre sécurité et notre défense, ne seront efficaces que si elles deviennent européennes, pour autant que l’Europe adopte le seul mode de gouvernance qui lui convienne : le fédéralisme. Il constitue la seule façon pour les Européens de parler d’une seule voix et de peser de tout leur poids sur la scène internationale, mais aussi pour être efficaces et efficients.

Comment progresser vers le fédéralisme, vers la démocratie ?

Le Parlement européen, fondé en 1952 et enfin élu directement depuis 1979, a toujours négligé son premier devoir : doter l’Europe d’une constitution. Celle-ci aurait dû établir les droits fondamentaux des citoyens, fixer les principes sur lesquels repose la légitimité du pouvoir politique, esquisser l’architecture générale des institutions fédérales et la répartition des compétences entre l’Europe, ses États, leurs régions et les pouvoirs locaux, et enfin garantir l’égalité entre les citoyens européens.

Le 30 juin 2009, la Cour fédérale de Karlsruhe a dit pour droit que : « La représentation des citoyens au sein du Parlement européen n’est pas liée à l’égalité des citoyens de l’Union européenne, conformément à l’article 9 du traité sur l’Union européenne, mais à la nationalité, qui est un critère de distinction absolument prohibé dans [l’Union européenne. Celle-ci] se trouve ainsi dans une contradiction de valeur avec le fondement de son identité en tant qu’union de citoyens, qui ne peut s’expliquer que par le caractère de l’Union européenne en tant qu’association d’États souverains”. La Cour fédérale de Karlsruhe ajoute que : « Même après l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, il manque à l’Union européenne un organe de décision politique issu d’une élection égale de tous les citoyens de l’Union européenne et ayant la capacité de représenter uniformément la volonté du peuple”.

Deux voies pourraient mener vers une constitution fédérale : soit une initiative de parlementaires européens, soit une décision de quelques gouvernements.

Comment faire du Parlement européen une Assemblée constituante ?

Après les élections européennes de 2024, le Parlement européen devrait enfin jouer son rôle naturel et se déclarer constituant, puis rédiger et voter une Constitution fédérale européenne.

Avant les élections européennes de 2024, le Parlement européen devrait mettre fin à la situation dénoncée par la Cour fédérale de Karlsruhe, en adoptant la loi électorale annoncée par l’article 21 alinéa 3 du traité sur la Communauté européenne du charbon et de l’acier de 1950 et par l’article 138 alinéa 3 du traité sur la Communauté économique européenne de 1957. Ces articles disposaient que leur Assemblée parlementaire « élaborerait des projets en vue de permettre l’élection au suffrage universel direct, selon une procédure uniforme, dans tous les États membres ».

Il n’en fut rien. En 1976, les gouvernements ont pris l’Acte qui a permis en 1979 la première élection au suffrage universel du Parlement européen, en réglant la représentation des citoyens de façon dégressivement proportionnelle, avec un seuil minimum de six députés par État membre et un plafond de 96 sièges. Cette disposition, devenue l’article 14 alinéa 2 du traité sur l’Union européenne,[1] ne respecte pas le prescrit de l’article 9 de ce même traité : « Dans toutes ses activités, l’Union respecte le principe de l’égalité de ses citoyens, qui bénéficient d’une égale attention de ses institutions, organes et organismes. Est citoyen de l’Union toute personne ayant la nationalité d’un État membre. La citoyenneté de l’Union s’ajoute à la citoyenneté nationale et ne la remplace pas. ».

Cet article 14 alinéa 2 pérennise le fait que le poids électoral d’un Maltais ou d’un Luxembourgeois est douze fois plus élevé que celui d’un Allemand, si du moins ils ont l’âge de voter, car le droit de vote est acquis partout à 18 ans, sauf en Autriche, et bientôt en Belgique semble-t-il, où c’est à 16 ans.

L’éligibilité est acquise à 18 ans dans 14 États membres ; à 21 dans 10 autres ; à 23 en Roumanie et à 25 en Italie et en Grèce.

La citoyenneté européenne permet, en vertu de l’article 20 alinéa 2b du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et de la directive 93/109/CE du Conseil, de voter au pays de résidence, s’il fait partie de l’Union, en respectant les règles en vigueur dans celui-ci. Les nationaux résidant à l’étranger peuvent voter dans leur propre pays, par correspondance et/ou à l’ambassade, voire électroniquement, mais les Bulgares, les Grecs et les Italiens ne peuvent le faire qu’à partir d’un État membre de l’Union et c’est interdit aux Tchèques, aux Slovaques, aux Irlandais et aux Maltais.

En Belgique, en Bulgarie, au Luxembourg, en Grèce et à Chypre, le vote est obligatoire, ailleurs, non.

L’article 14, alinéa 2, précité, ne prévoit pas de seuil électoral, mais Chypre a instauré un seuil de 1,8%, la Grèce de 3%, l’Italie, l’Autriche et la Suède de 4% ; 10 pays ont un seuil de 5%.

Dans la plupart des États membres, mais pas en France, en Allemagne, en Espagne, en Hongrie, en Roumanie et au Portugal, des listes arrêtées par les différents partis sont en compétition et les électeurs ont à voter pour un seul candidat. Au Luxembourg, le vote pour plusieurs candidats de listes concurrentes est autorisé. En Belgique, en Irlande, en Italie et en Pologne, le collège électoral est divisé en circonscriptions. L’Irlande, l’Irlande du Nord, l’Écosse et Malte pratiquent un scrutin à vote unique transférable, dans le cadre d’élections à circonscriptions plurinominales.[2]

Cette situation inégalitaire est inacceptable en démocratie. Elle aura perduré 45 ans au moins.

Pour y mettre fin, le Parlement européen élu en 2019 devrait adopter, en vue des élections de 2024, une loi européenne fixant au moins l’âge d’acquisition du droit de vote, le seuil électoral, le mode de scrutin, ainsi qu’un critère de représentation égalitaire des citoyens, pour améliorer la légitimité de son successeur. Cette loi pourrait prévoir, par exemple, que chaque région, Land ou canton, enverrait un député au Parlement européen s’il compte de 1 à 1.000.000 de citoyens ou d’habitants, deux, s’il compte de 1.000.001 à 2.000.000 de citoyens ou habitants, etc.

Jusqu’à présent, la date des élections au Parlement européen est fixée par le Conseil européen sur la base d’une proposition du Parlement européen, en mai ou début juin. Pour 2024, ce sera du 6 au 9 juin. Pour nous, il est donc encore temps d’agir.

Un nouveau noyau d’États européens est nécessaire

Depuis les années 1950, il est improbable que tous les États européens marquent d’emblée leur accord sur un scénario ou un projet, quel qu’il soit. Les exemples ne manquent pas, depuis que les Soviétiques se sont opposés à ce que les pays d’Europe centrale et orientale qu’ils occupaient bénéficient du plan Marshall, adhèrent à l’Alliance atlantique ou aux Communautés européennes.

Avec de la patience, toutefois, on peut arriver à ce que 28 États adhèrent par exemple à une définition commune des valeurs européennes, malgré leurs différences linguistiques, religieuses, etc. Ce fut réalisé en 2000, par le traité de Nice, grâce au soutien de Jacques Chirac, partisan de la laïcité. Ces valeurs peuvent se résumer en trois mots : humanisme, universalisme, progressivisme.

Pour réaliser progressivement un consensus, il faut constituer un noyau d’États, plus motivés ou plus réalistes ou plus libres que d’autres. Le BENELUX a ouvert la voie aux Six, qui furent 28 et sont 27 depuis le Brexit. Le BENELUX a aussi supprimé ses frontières intérieures en 1975. Dix ans plus tard, la France et l’Allemagne l’ont rejoint pour fonder la zone Schengen, qui compte aujourd’hui 23 États membres de l’UE, 4 États associés et Gibraltar. La zone euro a été initiée en 1999 par 9 États, elle en compte 20 depuis le 1er janvier 2023.

Un noyau extensible pourrait renforcer la souveraineté de l’Europe, en développant un pilier européen de l’OTAN et en accroissant nos capacités militaires, grâce à une plus grande efficience des dépenses de défense. Il pourrait mieux assumer notre part des charges inhérentes à notre défense et mieux limiter les risques, qui sont plus élevés si l’on se contente de suivre nos alliés américains. Un pilier européen de l’OTAN pourrait mieux équilibrer géopolitiquement l’Alliance et ainsi augmenter notre souveraineté. Il complèterait les institutions de l’UE, car celle-ci restera toujours incapable de mettre sur pied une défense européenne : elle n’est pas un État, mais une association d’États. Les États ont, depuis 1648, le monopole de l’usage légitime de la force.

Les dirigeants européens ne veulent malheureusement rien perdre de leurs compétences, même s’ils peinent à les exercer, alors que le 11 septembre 2018, les présidents américain[3] et russe[4] ont dit être d’accords avec la création d’une armée européenne.

Nous devons donc accroître la pression sur nos dirigeants, pour qu’ils tiennent mieux compte de notre désir de bonne gouvernance, de sécurité accrue et de défense efficiente. S’ils ne changent pas de cap, il faudra les sanctionner, dès 2024.

Comment influencer nos dirigeants ?

La Société européenne de défense AISBL (S€D) fondée en 2015[5] est, depuis le 7 mars 2023, appuyée par la Société européenne de défense en Europe centrale et orientale (S€DCEE), basée à Varsovie. Depuis le 21 mars, elles ont été rejointes par Avenir de l’Europe, l’Associazione Mazziniana Italiana, Citoyen d’Europe M3E (Europe, éthique, équité), Europe Unie dans sa Diversité, Europa-Union Heilbronn, l’Union des fédéralistes Européens (UEF) – Groupe Europe, UEF-Belgium, UEF in the Czech Republic, UEF-Luxembourg et Movimento Federalista Europeo (MFE) Sezione Ezio Vedovelli Valtellina Valchiavenna. Ensemble elles ont rédigé et elles diffusent un Manifeste pour des élections européennes de 2024 plus démocratiques.[6] Ce texte répond au constat que, lors de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe, lancée le 9 mai 2021 et  qui s’est terminée il y a un an, une liste de 49 changements à introduire au plus vite dans la gouvernance, donc dans les institutions européennes, a été établie. Si le Parlement européen a soutenu ces demandes de changement, ni le Conseil de l’Union européenne, ni le Conseil européen n’y ont donné suite.

Faisons en sorte que les changements attendus aient lieu après l’élection du nouveau Parlement européen, à la fin du printemps 2024. Ils ne résulteront pas d’une réforme des actuels traités sur l’Union européenne (TUE) et sur son fonctionnement (TFUE). L’article 48 du TUE exige l’accord unanime des États membres, ce qui est impossible.

Il n’y aura pas d’Europe forte et souveraine si elle n’est pas démocratique, ce qui nécessite une constitution approuvée par nous « le peuple souverain », les citoyennes et citoyens européens. Comme les députés français de 1789, les parlementaires européens nouvellement élus devraient s’engager à jouer leur rôle au regard de l’Histoire par une sorte de « Serment du Jeu de Paume » européen : « Nous jurons de ne jamais nous séparer et de nous rassembler partout où les circonstances l’exigeront, jusqu’au jour où la constitution (de l’Europe) sera établie et affermie sur des fondements solides ».

Pour qu’apparaisse l’Europe que nous voulons, fédérale, souveraine, forte mais pacifique et démocratique, respectueuse de notre milieu naturel, rejoignons les premiers signataires de ce manifeste et, pendant un an, menons campagne pour qu’une démocratie authentique triomphe en Europe. La démocratie est la première de nos valeurs communes fondamentales.

Aujourd’hui, il semble que les États qui se savent les moins souverains, parce qu’ils ont adhéré à l’Union européenne, à l’Alliance atlantique, à la zone Schengen, à la zone euro et à son approfondissement, et qui ont des moyens modestes, en termes de budget de défense et de base industrielle et technologique de défense, seront probablement les premiers membres des États-Unis d’Europe. Le processus qu’ils auront à suivre pour se fédérer est fort simple. Une animation vidéo de 3 minutes le montre, elle est en ligne sur le site de la Société européenne de défense AISBL, à la page https://www.seurod.eu/videos_audios.html.

Les États-Unis d’Europe assureraient la partie des relations internationales, de la sécurité et de la défense de l’Europe, que céderaient les États membres. Les compétences seraient réparties entre les niveaux de pouvoir selon le principe de subsidiarité. Les relations internationales seraient gérées comme au Canada ou en Allemagne. Les forces armées fédérales coexisteraient avec les armées des États membres. À l’actuel Conseil européen succéderait un Sénat, représentant les États membres. Le Sénat et le Parlement européens auraient le pouvoir de voter le budget, de lever l’impôt, d’arrêter les comptes correspondants et de prendre des initiatives législatives, même si la technicité des matières fait que la plupart des nouveaux textes émanent aujourd’hui des pouvoirs exécutifs et des administrations.

Progressivement, des États-Unis d’Europe fondés par un petit noyau de petits États pourraient, sans se déséquilibrer, absorber des États de plus en plus imposants, comme l’Espagne et l’Italie, voire l’Allemagne, lorsque le noyau étendu pèsera aussi lourd que chacun de ces États. Les États-Unis d’Europe pourraient alors intégrer la France, sa force de frappe et son siège permanent au Conseil de sécurité des Nations-Unies.

Cela fait 73 ans que Robert Schuman a prononcé son discours fondateur. Les événements dramatiques qui se déroulent en Ukraine, en Géorgie, en Asie et en Afrique, ainsi que ceux que nous voyons poindre à l’horizon, notamment dans la zone indopacifique, nous imposent d’être lucides. Les traités européens ne peuvent pas nous garantir, ainsi qu’aux générations futures, un avenir de qualité. Rien ne peut justifier d’attendre encore plus longtemps.

Sans une constitution apte à fonder une Europe fédérale, forte, souveraine et démocratique, demain, il sera trop tard pour rendre à l’Europe la place qui lui revient sur la scène internationale.

C’est pourquoi une deuxième étape de notre action consiste en un Appel aux partis politiques démocratiques. Il a pour titre « UN PROJET, UNE MÉTHODE ET UN AGENDA POUR BÂTIR LA FÉDÉRATION EUROPÉENNE ».

Il est porté par la Section italienne du Mouvement européen, Avenir de l’Europe, l’Associazione Mazziniana Italiana, Citoyen d’Europe M3E (Europe, éthique, équité), Europe Unie dans sa Diversité, Europa-Union Heilbronn, l’Union des Européens fédéralistes (UEF) – Groupe Europe, UEF-Belgium, UEF in the Czech Republic, UEF-Luxembourg, la Société européenne de défense AISBL (S€D), la Société européenne de défense en Europe centrale et orientale (S€DCEE) et le Movimento Federalista Europeo (MFE) Sezione Ezio Vedovelli Valtellina Valchiavenna.

Depuis la signature du Traité de Lisbonne, en 2007, il y a quinze ans et demi, l’Union européenne a été confrontée à une suite de défis qui ont mis en évidence sa faible capacité à réagir et à répondre aux attentes de ses citoyennes et citoyens. L’agressivité affirmée par Poutine à Munich en 2007, et exercée en 2008 à l’égard de la Géorgie, puis en 2014 en Crimée et dans le Donbass, est restée sans réponse, ce qui l’a incité à se comporter de façon encore plus horrible à partir du 24 février 2022 en Ukraine. Face aux crises financière de 2008, monétaire de 2010, migratoire de 2015, sanitaire de 2019 à 2022 et sécuritaire, que ce soit en Afghanistan, dans le Sahel ou en Ukraine, l’Union européenne et ses États membres ont pris certaines mesures, mais pas comme aurait pu le faire une Fédération européenne, disposant d’une politique étrangère et de sécurité unique, comportant une défense commune, et des politiques budgétaire, monétaire, migratoire, sanitaire, sociale et environnementale permettant à l’Europe d’agir efficacement dans l’intérêt de ses citoyens. Mais il ne suffit plus aujourd’hui de suggérer une Fédération européenne, il faut la faire.

Il est nécessaire et urgent, à cet effet, de fixer les éléments fondamentaux d’un PROJET, d’une MÉTHODE et d’un AGENDA, en s’inspirant des dizaines d’États fédéraux qui existent de par le monde, mais en tenant compte des cultures, des valeurs et de l’histoire propres aux Européens. Comme la zone Schengen ou la zone Euro, cette Fédération serait fondée par les États qui le voudront, parallèlement à l’Union européenne, dont elle serait membre, mais cette fois par la voie d’une Assemblée constituante, avec la mission de rédiger et d’adopter une vraie Constitution, pas un nouveau traité international. Tel est le PROJET.

Les éléments essentiels de ce texte constitutionnel devront être tout d’abord une citoyenneté unique attribuée à toutes celles et à tous ceux qui vivent dans la Fédération européenne et garantie par la Charte des droits fondamentaux. Il appartiendra ensuite au législateur fédéral, qui sera bicaméral, de fixer le budget de la Fédération et de le financer par des ressources propres. Toute la Fédération européenne utilisera la monnaie unique européenne. La politique étrangère et de sécurité commune devra comporter une défense commune. Aucun pouvoir de veto ne sera accordé aux États membres. Le gouvernement fédéral sera responsable devant le législateur fédéral.

La MÉTHODE que devrait suivre l’Assemblée constituante pour rédiger et adopter une Constitution fédérale comprendra un dialogue constant et approfondi avec les parlements nationaux et la société civile. Elle sera obligatoirement soumise à ratification par les citoyens par un référendum paneuropéen, car la souveraineté appartient au peuple. Ainsi seront respectés les principes tant de la démocratie représentative que de la démocratie participative. Dans cette perspective, il serait utile de convoquer des assises interparlementaires comme celles qui se sont réunies à Rome en novembre 1990.

L’AGENDA est lié à la dixième législature du Parlement européen (2024-2029) afin de fonder une Fédération européenne avant tout nouvel élargissement.

Il est temps d’en venir à deux brèves considérations finales.

Nos dirigeants se veulent plus souverains, mais ils se soumettent de plus en plus aux États-Unis d’Amérique, alors que les intérêts de ceux-ci diffèrent des nôtres. Or, l’Occident perd de son influence face à la Russie, à la Chine, etc., notamment parce que ces autocraties ne prennent en compte que leurs intérêts et les rapports de forces. Si l’Europe veut promouvoir nos valeurs et les droits de l’Homme, elle doit être plus forte que ne l’est l’UE. Son Soft Power, par ailleurs si utiles dans les relations avec les pays pacifiques, ne sert à rien face à des gens qui se servent du Hard Power.

C’est pourquoi nous appelons les partis politiques européens à intégrer ces idées dans leurs programmes électoraux, et nous appellerons à voter pour les partis qui l’auront fait.

J’ai dit et je me tiens prêt à répondre à d’éventuelles questions.

A une question sur les partis politiques européens, j’ai répondu que les partis politiques n’existent qu’au niveau national. Au niveau du Parlement européen, existent sept groupes politiques. Un minimum de 23 membres est nécessaire pour former un groupe politique, et ce dernier doit comprendre des membres représentant au moins un quart des États membres.

Certains des 7 groupes se sont intitulés partis européens, mais c’est faux : les positions politiques prise par un groupe découlent d’une concertation interne ; aucun membre ne peut recevoir un mandat de vote obligatoire. Les Spitzenkandidaten ne sont pas légitimes en dehors de la circonscription où ils ont été élus.

Le groupe du Parti populaire européen compte 14 partis, dont 6 se disent démocrates-chrétiens. Il dit s’engager à créer une Europe plus forte et plus sûre d’elle, construite au service de ses citoyens, plus compétitive et plus démocratique, où les citoyens peuvent construire la vie qu’ils souhaitent.

Le groupe de l’Alliance Progressiste des Socialistes et Démocrates au Parlement européen a comme partenaire le parti socialiste européen (PSE), qui réunit 34 partis socialistes, sociaux-démocrates, travaillistes et démocrates de l’Union européenne et de la Norvège. En outre, 12 partis sont associés et 12 partis sont observateurs.

Renew Europe Group compte 37 partis vaguement centristes.

Le groupe des Verts/Alliance libre européenne comporte 20 partis, dont Volt Allemagne.

Le groupe «Identité et démocratie» compte notamment 3 partis importants d’extrême-droite.

Le groupe des Conservateurs et Réformistes européens, comporte une quinzaine de partis dont certains sont au pouvoir, en Pologne, en Italie, , en Flandre (N-VA), ou proche de l’être, en Espagne.

Le groupe de la gauche au Parlement européen compte 20 partis.


[1] L’article 14 alinéa 2 du traité sur l’Union européenne dispose :

1. Le Parlement européen exerce, conjointement avec le Conseil, les fonctions législative et budgétaire. Il exerce des fonctions de contrôle politique et consultatives conformément aux conditions prévues par les traités. Il élit le président de la Commission.

2. Le Parlement européen est composé de représentants des citoyens de l’Union. Leur nombre ne dépasse pas sept cent cinquante, plus le président. La représentation des citoyens est assurée de façon dégressivement proportionnelle, avec un seuil minimum de six membres par État membre. Aucun État membre ne se voit attribuer plus de quatre-vingt-seize sièges. Le Conseil européen adopte à l’unanimité́, sur initiative du Parlement européen et avec son approbation, une décision fixant la composition du Parlement européen, dans le respect des principes visés au premier alinéa.

3. Les membres du Parlement européen sont élus au suffrage universel direct, libre et secret, pour un mandat de cinq ans.

4. Le Parlement européen élit parmi ses membres son président et son bureau. Le passage barré dans l’alinéa 2 est celui critiqué par la Cour fédérale de Karlsruhe.

[2] Les élections à circonscriptions plurinominales garantissent une représentation proportionnelle et indépendante. Ce mode de scrutin donne à l’électeur la certitude que son vote n’ira pas à un candidat qu’il rejette. Il lui permet d’exprimer sa préférence secondaire en faveur d’un candidat d’un parti différent de celui du premier choix et donc d’influer sur la formation des coalitions. Ce mode de scrutin a été élaboré au XIXe siècle par Thomas Hare (1808-1891) en Grande-Bretagne, ainsi que par Carl Andrae (1812-1893) au Danemark. Il est pratiqué en Irlande, en Irlande du Nord, en Écosse et à Malte. Hors d’Europe, il est utilisé en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Tasmanie.

L’électeur doit indiquer sur son bulletin de vote un ordre de préférence entre les candidats. Après le comptage de l’ensemble des bulletins, le quotient, dit de Droop, requis pour l’élection d’un candidat est déterminé par la division du nombre de votes valides par le nombre de sièges à pourvoir plus un. Les candidats ayant obtenu un nombre de suffrages de premier choix supérieur ou égal au quotient de Droop sont élus. Les votes obtenus par ces candidats au-delà du quotient sont répartis sur les candidats non élus qui avaient été positionnés en deuxième choix. La répartition se fait selon un mécanisme qui peut varier selon les pays. Si aucun candidat n’a atteint le quotient, alors le candidat ayant obtenu le moins de votes de premier choix est éliminé. Ses votes sont alors redistribués aux candidats qui avaient été positionnés en deuxième choix par ses électeurs. Le processus se poursuit jusqu’à ce que tous les sièges soient pourvus.

[3] Fareed Zakaria for CNN on 11/11/2018, Interview of President Emmanuel Macron, https://edition.cnn.com/videos/world/2018/11/10/emmanuel-macron-fareed-zakaria-trump-tweet-sot-gps-vpx.cnn

Fareed Zakaria for CNN on 11/11/2018 Interview of President Donald Trump, https://edition.cnn.com/videos/world/2018/11/10/trump-macron-bilateral-meeting-bts-vpx.cnn/video/playlists/intl-latest-world-videos/

[4] sn, « Vladimir Poutine répond en exclusivité aux questions de RT France », 11/11/2018, https://francais.rt.com/international/55305-vladimir-poutine-repond-exclusivite-questions-rt-france-video.

[5] La Société européenne de défense AISBL (S€D) travaille sans relâche depuis 2015 : trois livres ont été publiés en français, le troisième a été traduit en néerlandais et en anglais, sa deuxième édition est en cours d’achèvement. Elle sera disponible en français, en néerlandais, en anglais, ainsi qu’en allemand, grâce au soutien du ministre-président de la Deutschsprachige Gemeinschaft Ostbelgien.

[6] Le Manifeste pour des élections européennes plus démocratiques en 2024 est disponible en 23 langues sur les sites web de Europe Unie dans sa Diversité et de la Société européenne de défense AISBL.


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